RAY & LIZ

Auteur : Richard Billingham, né en 1970, est un photographe, artiste, cinéaste et professeur d’art anglais. Son travail a surtout concerné sa famille, l’endroit où il a grandi dans les West Midlands, mais aussi des paysages ailleurs. Billingham est surtout connu pour le livre de photographies Ray’s a Laugh (1996), qui décrit la vie de ses parents. Il a également publié les collections Black Country (2003), Zoo (2007) et Paysages, 2001-2003 (2008). Il a réalisé plusieurs courts métrages, dont Fishtank (1998) et Ray (2016). Il a adapté ce dernier dans son premier long métrage, Ray & Liz (2018), qui a été présenté au Festival de Locarno. Il a remporté le prix de la photographie 1997 de la banque privée Citibank et a été sélectionné pour le prix Turner de 2001. Son travail est conservé dans les collections permanentes de la Tate Gallery, du Victoria And Albert Museum et de la Collection d’art du gouvernement à Londres.

Résumé : Nous sommes dans la banlieue de Birmingham dans les années 80. Ray, Liz et leurs trois enfants se débrouillent plutôt mal que bien et vivent dans la misère. Le photographe et cinéaste Richard Billingham retrace en trois souvenirs et trois époques différentes le quotidien tumultueux de sa famille.

Analyse : Ce film pourrait être répulsif voire répugnant. Pourtant il est d’une beauté âpre et poignante. Le photographe Richard Billingham s’est fait connaître par les photos de sa famille qu’il a publiées en 1997 dans son album Ray’s a laugh qui avait fait sensation. En effet, issu d’une famille misérable de la région de Birmingham, ce sont ses parents, son père alcoolique sa mère obèse et très tatouée, qu’il a photographiés sans concession, dans leur quotidien sordide, crûment, mais avec une certaine tendresse. Il reprend ce thème du milieu familial dans ce film qui se déroule en trois épisodes et trois périodes différentes. La première période commence et clôt le film. Ray, âgé, abandonné de sa femme, vit cloitré dans la chambre d’un HLM minable, remplissant inlassablement des verres à ras bord d’un breuvage que lui apporte un homme qui, semble-t-il, fabrique lui-même cet alcool. Images pathétiques de quelqu’un à qui la vie n’a rien donné et qui attend la fin en se saoulant toute la journée. Les autres épisodes nous montrent Ray et Liz dans leur environnement sordide, murs pourris, papiers peints déchirés, amoncellement d’objets inutiles de récupération, pisse de chien, mégots, saleté, vomi, animaux domestiques en liberté ou en cage. Liz passe sa journée à fumer et à faire des puzzles. Ray est au chômage. Ils vivent de petites aides sociales, d’emprunts, et n’arrivent pas à payer leurs factures. C’est un univers terrifiant qui est celui des pauvres de l’ère Thatcher. La caméra filme les personnages au plus près, dans des postures souvent peu flatteuses, avec une image déjà réduite par le format 4:3, dans des couleurs chaudes au cadrage très soigné. On sent que c’est le regard de l’enfance, qui n’est pas dénué de tendresse, que restitue Billingham. Le seul moment où l’on quitte cet univers claustrophobique c’est dans le troisième épisode où l’on suit les aventures d’un des fils, le jeune Jason, qui ne rentre pas à la maison sans même que ses parents s’en aperçoivent, comme si la misère noire rendait les gens négligents de tout. Mais l’extérieur n’est pas mieux que l’intérieur. Jason connaîtra pourtant les seules marques d’affection que lui prodiguera la mère d’un ami. Une peinture glaçante d’une réalité qu’il faut connaître.

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