Festival de Cannes 19 mai 2022

Parmi les premiers films de la compétition, figure l’œuvre à quatre mains de de Charlotte Vandermeersch et Felix Van Groeningen, Le otto montagneCharlotte Vandermersch née en 1983 est une actrice belge flamande. Le Otto montagne est son premier film. Felix Van Groeningen, né en 1977 est un réalisateur belge. Il est connu pour plusieurs courts métrages et pièces de théâtre, et pour ses films La Merditude des choses, présenté à Cannes en 2009, Alabama Monroe en 2012 sélectionné aux oscars et primé dans plusieurs festivals et Belgica en 2016. Le duo adapte un livre éponyme de Paolo Cognetti. L’action se situe dans les hauteurs alpines du Val d’Aoste. Elle retrace l’amitié d’une vie entre deux enfants, Pietro et Bruno que rien ne prédestinait à être proches, le premier est citadin, le second montagnard. Ils se retrouvent chaque année dans cet paradis de montagnes, où ils bâtissent de leurs mains une maison commune. Les images de la nature sont magnifiques dignes des meilleures publicités pour les randonnées alpestres, le format est carré, pourquoi ? on ne sait pas trop, et le film dure 2h et demi. C’est très très long pour un récit fleuve, pour une fable existentielle, un discours écolo sur le retour à la nature très convenu, une leçon de vie bourrée de clichés qui n’en finit plus de s’étirer alors qu’il ne se passe pas grand-chose. Le plus incompréhensible encore est la musique folk américaine qui accompagne ce film qui a lieu dans les Alpes italiennes, parlé en italien, joué par des acteurs italiens !

D’une toute autre facture, et heureusement, est La femme de Tchaikovski de Kirill Serebrennikov. Né en 1969 c’est un réalisateur russe. Il commence sa carrière au théâtre puis à la télévision. Il est d’ailleurs nommé an 2012 directeur du Théâtre dramatique de Moscou. Il est l’auteur du film Leto,sélectionné à Cannes en 2018, et de La fièvre de Petrov sélectionné l’an passé. Mais Serebrennikov n’avait pas pu se rendre au festival, du fait de son assignation à résidence à Moscou pour un prétendu détournement de fonds publics depuis 2017. Il a été condamné en juin 2020 à de la prison avec sursis, évitant ainsi la peine de 6 ans de prison ferme réclamée par le parquet. Il est aujourd’hui réfugié en Allemagne et va mettre en scène Le moine noir de Tchekov au prochain festival d’Avignon. 

C’est l’histoire tragique d’Antonina Milioukova, issue de la petite noblesse moscovite, qui tombe follement amoureuse de Tchaïkovski, alors professeur au conservatoire. Elle lui écrit une lettre de déclaration enflammée lui précisant qu’elle ne pourra vivre sans lui. Il accepte de la rencontrer, repousse ses avances puis fini par lui proposer le mariage après qu’elle lui ait fait un chantage au suicide. Ils se marient en 1877 mais il l’a prévient contre son tempérament difficile, ses habitudes de célibataire et lui propose un « amour calme et fraternel ». Très vite on comprend qu’il est homosexuel et que c’est pour lui un mariage de façade pour éviter le scandale, mariage qui ne sera jamais consommé car il hait les femmes qu’il ne peut toucher. Quant à elle, s’enfonçant dans sa névrose, elle refuse obstinément de voir la réalité et continue de l’aimer désespérément. C’est donc la description d’une passion ravageuse et d’une forme de folie. C’est un film flamboyant à la mise en scène brillante. La reconstitution historique est fastueuse et les quelques accents baroques sont allégés par des passages oniriques. Un film puissant qui ne peut laisser indifférent. Certes il nous montre la situation terrible de la femme en Russie en cette fin du 19ème siècle. Mais on peut y voir la métaphore de la Russie d’aujourd’hui avec son peuple enfermé dans le mensonge et la contrainte. Un film qui figurera certainement au palmarès, d’abord parce c’est dans l’air du temps mais surtout pour l’interprétation absolument magistrale d’Alyona Mikhailova dans le rôle d’Antonina.

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