Prima la Vita

Autrice : Francesca Comencini, née en 1961, est une réalisatrice et scénariste italienne. Elle commence des études de philosophie puis décide de s’installer en France en 1982 où elle rencontre le producteur Daniel Toscan du Plantier, son futur mari. Elle réalise son premier film, Pianoforte (1984), qui remporte le prix Vittorio De Sica, puis La lumière du lac (1988). Elle réalise ensuite plusieurs documentaires dont Shakespeare à Palerme présenté hors-concours dans la sélection officielle du Festival de Cannes 1998. Elle revient ensuite à la fiction, notamment Zeno (2001), présenté à Un certain regard à Cannes, J’aime travailler présenté au Festival de Berlin, Prix du jury œcuménique (2004), Lo spazio bianco (2009) et Un journée à Rome (2012) présentés en concours à la Mostra de Venise. Elle réalise également des séries télévisées dont Gomorra. Prima la Vita est son 11^ème film. Il a été présenté hors concours à la Mostra de Venise 2024. 

Interprètes : Fabrizio Gifuni (Luigi) ; Romana Maggiora Vergano (Francesca adulte) ; Anna Mangiocavallo (Francesca enfant).

Résumé : Francesca Comencini se remémore son enfance enchantée et son adolescence troublée au côté deson père Luigi, immense metteur en scène du cinéma italien.

Analyse : Francesca Comencini offre, dans Prima la Vita, un hommage vibrant à celui qui fut un grand cinéaste italien, mais surtout un merveilleux père. Véritable déclaration d’amour à cette vie vécue à ses côtés dans l’enfance puis dans les troubles de la jeunesse et enfin dans la maturité d’une adulte qui a tiré toutes les leçons de vie que son père lui a données et surtout l’amour du cinéma. Un film terriblement attachant, d’une grande tendresse, subtil, qui nous tire des larmes d’émotion devant tant de beauté. La première partie est consacrée à la période de l’enfance. Francesca a voulu nous transmettre ce qu’a été son rapport privilégié à son père en éliminant le contexte familial, ses sœurs et la mère sont totalement absentes. Un tête-à-tête avec un père aimant, qui parle à sa petite fille comme à une adulte, qui lui apprend la liberté, l’absence de préjugés qui lui permettra de vivre libre, de s’épanouir dans sa créativité en dehors de toute rigidité morale. Un chant d’amour envers ce père, stature du cinéma italien, qui l’entraine, petite fille, sur les plateaux de tournage ; on la voit notamment lors du tournage, remarquablement reconstitué, de Les Aventures de Pinocchio, l’un des chefs-d’œuvre de son père. Un père très présent à l’heure où les démons de la drogue s’emparent de sa jeune fille, dans la période troublée des années de plomb et de l’idéal révolutionnaire exalté d’une grande partie de la jeunesse italienne. Luigi Comencini tire littéralement sa fille de cet enfer, arrête toutes ses activités et l’éloigne à Paris, où il ne la quitte pas d’une semelle, le temps qu’il faudra. Mais ce n’est pas qu’un hommage au père. Francesca Comencini rend également un hommage émouvant au cinéma. A cet art qui envahit la vie et lui est indissociablement lié. « Prima la Vita », certes, mais le ou la cinéaste ne peut dissocier sa vie de l’œuvre qui l’envahit. A l’image de son père, la cinéaste fait preuve d’une grande culture cinématographique. Son film balaie l’histoire du cinéma en nous donnant de nombreux extraits, notamment L’Atlantide, de Pabst, L’Enfance nue de Pialat, Païsa, de Rossellini, et des extraits de films muets que son père lui raconte avoir sauvés de la destruction et fondé la Cinémathèque de Milan. C’est un film très abouti, aux cadrages très soignés, avec une belle lumière, un beau travail sur les flous et les couleurs, dans une mise en scène délicate et dépouillée. Entre réalisme et onirisme, il se dégage de cette œuvre un charme, une beauté, une émotion qui nous prend au cœur. La dernière scène, poignante, achève ce film dont on sort bouleversé.e.s et émerveillé.e.s.