
Auteur : Thierry Frémaux, né en 1980, grandit dans la banlieue lyonnaise où, dès son plus jeune âge, il est initié au cinéma par son père, qui anime un ciné-club. Il devient chroniqueur pour la radio libre associative Radio Canut et étudie l’histoire sociale du cinéma jusqu’en DEA. Il écrit un mémoire de maîtrise sur les débuts de Positif. Travaillant comme bénévole à l’Institut Lumière dès sa création, il y obtient un poste en 1989. Il en est nommé directeur artistique en 1997, aux côtés du président Bertrand Tavernier avec lequel il organise des événements majeurs tels que le centenaire du cinéma en 1995. En 1999, il succède à Gilles Jacob en tant que délégué artistique du Festival de Cannes. À la tête de la sélection cannoise depuis 2004, il fait souffler un vent de changement sur Cannes : il institue le retour des studios américains sur le tapis rouge, étend le Palais des Festivals aux films de genre et au cinéma d’animation, tout en poursuivant l’ouverture aux cinémas exotiques. C’est aussi grâce à lui que les films classiques restaurés sont désormais projetés.
Résumé : Il y a 130 ans, les frères Lumière inventaient le cinéma. Grâce à la restauration de 120 vues inédites, ce film revient sur les origines du 7e art.
Analyse : Huit ans après la sortie de Lumière ! L’aventure commence (2017) Thierry Frémaux continue d’explorer l’origine du cinéma avec les frères Lumière. Après avoir rappelé La sortie des usines Lumière à Lyon avec ses trois versions et L’arroseur arrosé, parmi les films les plus célèbres, il nous présente 120 « vues cinématographiques » de 50 secondes chacunes, superbement restaurées en 4K, la plupart inédites et rares, projetées pour la première fois sur grand écran. On réalise que ces cinéastes de la toute première heure ont envoyé des opérateurs dans le monde entier, de la place Saint-Marc à Venise à Lyon, en passant par New York, Boston, Alger, Saigon, Chamonix, Toulouse ou Toulon, en Afrique et en Amérique du Sud pour un total de 1500 films. Un témoignage exceptionnel d’artistes, de gens de la rue, du peuple laborieux, des réjouissances populaires, des trains en marche où arrivant dans la gare de La Ciotat, des saltimbanques des rues, des pêcheurs raccommodant leurs filets sur le port de Marseille ; des témoignages exceptionnels, beaux et émouvants d’un temps révolu. Par ailleurs une vraie leçon de cinéma, avec des plans séquences et des travellings qu’ils appelaient des panoramas, des caméras subjectives en filmant la rentrée d’un train dans un tunnel, des making of en filmant l’opérateur qui filme l’évènement avec sa drôle de machine noire à manivelle sur un trépied, qu’ils appelaient le cinématographe. Après avoir filmé des scènes de vie ils se sont essayé à la fiction. Tout le cinéma est là comme le souligne avec beaucoup d’emphase, parfois pontifiante, et de lyrisme la voix off de Frémaux qui ne manque pas de nous signaler la beauté évidente des images. Son film sort 130 ans exactement après que les frères Lumière qui viennent de réaliser La Sortie de l’usine Lumière à Lyon (1895),ouvrent la première salle de cinéma dans le salon indien du Grand Café, à Paris. Sur la musique très (trop ?) présente de Gabriel Fauré, contemporain des Lumière, le réalisateur, avec sa grande culture cinématographique met l’accent sur l’influence déterminante des frères Lumière dont l’œuvre contient en germe tout le cinéma moderne par l’influence qu’elle a exercé sur des cinéastes contemporains tels Ozu, Ford, Bresson, Akerman, Varda, Kiarostami, Rossellini. Mais il est toutefois regrettable qu’il n’ait pas cru bon, dans son documentaire, de citer le nom d’Alice Guy, première réalisatrice femme au monde qui, dès 1896 réalise, dans la lignée des Lumière, un film de fiction cinématographique en images réelles, La Fée aux choux, un an après la projection des frères Lumière à laquelle elle a assisté en qualité de secrétaire de Léon Gaumont. Malgré ce bémol il reste que ces origines du cinéma sont passionnantes à explorer. Lors de la toute première projection de 1895 un journaliste écrivait que grâce au cinéma « la mort cessera d’être absolue ».