Vivre

Auteur : Oliver Hermanus, né en 1983 au Cap est un cinéaste sud-africain. Son premier film, Shirley Adams est récompensé en 2009 au Festival de Locarno, Licorne d’or et Prix Signis au Festival d’Amiens. En 2011, Beauty est sélectionné au festival de Cannes où il remporte la Queer Palm. Son troisième film, La rivière sans fin (2015) est en compétition à la Mostra de Venise. Son quatrième film Moffie (2019), est présenté dans la section Orrizonti à la Mostra de Venise, Prix Sirène au Festival de Thessalonique, Prix spécial du jury au festival de Dublin 2020. Vivre (2022) est son cinquième film.

Interprètes : Bill Nighy (Mr Williams) ; Aimee Lou Wood (Miss Harris) 

Résumé : Londres 1953. Enfermé dans un morne quotidien, Mr Williams, fonctionnaire, se fait diagnostiquer une grave maladie. Rejetant son quotidien banal et routinier, il va alors se dépasser et vivre enfin pleinement ce qui lui reste à vivre.

Analyse : Adapté d’un film homonyme, le chef d’œuvre japonais d’Akira Kurosawa, Oliver Hermanus réalise un film plein de subtilité et d’élégance qui met en scène un vieil anglais, Mister Williams, très distingué, empesé dans sa vie et ses costumes sombres et chapeau melon, avec une vie réglée comme du papier à musique, le train, le bureau, le train, la maison. Et on recommence le lendemain. A son bureau il est taiseux, indéchiffrable, rigide, loin de tous et sans doute de lui-même, le teint cireux et l’œil éteint. Il est surnommé « ‘le zombie’ comme une momie vivante » lui révèlera Miss Harris. Il dirige un service à la mairie où les employés sont, comme lui, compassés, plein de retenue, silencieux, respectueux ; bref, un monde feutré, routinier et poussiéreux, comme celui des années 50, filmé dans le format 1,66 de l’époque. A part une charmante stagiaire, Miss Harris, qui ose sourire et semble plus décontractée que les autres. Jusqu’au jour où Mr Williams part plus tôt de son travail et ne se présente pas le lendemain. C’est une bombe dans le bureau. La routine à ce point bousculée ! il est sûrement arrivé quelque chose, il faut appeler la police ! La vérité qui nous est révélée est que Mr Williams avait rendez-vous avec son médecin qui lui apprend qu’il n’en a plus que pour quelques mois de vie, six ou huit maximums. C’est l’électrochoc chez ce vieux monsieur qui réalise qu’il est temps de vivre, de vivre pleinement les quelques mois qui lui restent et de livrer des batailles contre ses supérieurs qui s’opposent, notamment, à la construction d’une aire de jeu dans une zone sinistrée d’après-guerre. Par la magie de l’interprétation de Bill Nighy on voit Mr Williams changer. Des sourires s’esquissent sur son visage qui devient émouvant, une lueur malicieuse illumine son regard comme si l’enfance revenait. Il rencontre un fêtard qui l’entraine dans une sorte de boite de nuit où il s’enivre tout en restant très digne, il noue une relation de père à fille avec Miss Harris qu’il invite dans un grand restaurant, qu’il amène au cinéma voir un film avec Gary Grant. Un moment très intense où dans un pub il lui fait la confidence de son état de santé.

Le charme mystérieux qui se dégage de ce film tout en douceur et en retenue tient essentiellement à deux éléments principaux : le jeu extraordinaire de Bill Nighy, plus familier des rôles de vieux crooner, dont les expressions en disent plus long que des discours, et les dialogues fins et intelligents de Kazuo Ishiguro, prix Nobel de littérature en 2017 qui a scénarisé le film. La musique classique favorise l’émotion qui se dégage de ce film tout en délicatesse qui nous donne une belle leçon de vie et dont on sort la gorge nouée. 

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