
Auteur : Christian Petzold né en 1960 est un réalisateur, scénariste, acteur allemand. Il poursuit à Berlin des études de lettres et de théâtre. Il passe ensuite par l’Académie de cinéma et de télévision et devient assistant à la réalisation. De 1987 à 1993, il réalise des courts métrages, téléfilms et documentaires pour la télévision. Il dirige son premier film, Contrôle d’identité en 2000 qui traite de la vie d’un couple de terroristes d’extrême gauche, qui lui confère une certaine reconnaissance et fera de lui l’un des chefs de file de la « nouvelle vague » du cinéma allemand. En 2003 il met en scène son deuxième film, Wolfsburg. Suivent une série d’autres films Fantômes (2005), puis Yell, Jerichow, Barbara et Poenix où il dirige l’actrice Nina Hoss. En 2020 sort Ondineavec Paula Beer. Le Ciel rouge a obtenu l’Ours d’argent au Festival de Berlin 2023.
Interprètes : Thomas Schubert (Léon) ; Paula Beer (Nadja) ; Langston Uibel (Félix) ; Enno Trebs (le maître-nageur) ; Mathias Brandt (l’éditeur).
Résumé : Réuni dans une petite maison de vacances au bord de la mer Baltique, un groupe d’amis profite des très chaudes journées d’été pour faire plus ample connaissance. Il n’a pas plu depuis des semaines. Les forêts desséchées qui les entourent commencent à s’enflammer. Et très vite, les flammes sont là.
Analyse : Le film commence dans une atmosphère inquiétante. Les premiers mots que l’on entend sont « il y a quelque chose qui cloche ». Effectivement quelque chose ne va pas. La voiture de Félix vient de tomber en panne au milieu d’une forêt inquiétante, où l’on sent une sourde menace ; mais rapidement on arrive dans un climat plus serein. Léon et Félix sont arrivés à destination, dans la maison de la mère de ce dernier, perdue au milieu de la forêt, pour passer une partie de l’été. C’est une maison près de la mer, la Baltique mais qui pourrait aussi bien être la Méditerranée. Léon est venu pour finir d’écrire son deuxième roman, Félix pour préparer un portfolio de photos pour intégrer une école d’art. Contre toute attente la maison est occupée. Le réalisateur a la bonne idée de laisser longtemps hors champ celle qui occupera une place centrale dans le film, Nadja. Sa présence se manifeste par un lit défait, des sous-vêtements qui traînent un peu partout sur le sol, ses soupirs la nuit, quand elle fait l’amour derrière une cloison trop fine avec son petit ami le maître-nageur sauveteur ; puis l’apparition furtive d’une robe rouge entre deux draps étendus qui part ensuite à vélo. Léon est un jeune écrivain corpulent, très centré sur lui-même, d’autant plus arrogant qu’il est en panne d’inspiration pour son second roman. Il montre constamment un visage maussade, bougon, antipathique. Il n’est préoccupé que par l’écriture de son livre et la visite prochaine de son éditeur. Il est plein de préjugés de classe, méprisant l’opinion de Nadja depuis qu’il a vu qu’elle vendait des glaces sur la plage. Pourtant ii est loin d’être insensible à son charme dévastateur (magnifique Paula Beer) mais il ne peut s’empêcher, par jalousie, désir refoulé, d’être très désagréable avec elle. Félix l’invite souvent à l’accompagner à la plage mais il prétexte toujours son travail alors qu’il ne fait pas grand-chose tout en ne manquant pas de rappeler à Félix qu’il est là pour travailler. Ce qui semble être une chronique estivale légère qui a la grâce, la subtilité, la délicatesse des marivaudages d’un Rohmer va glisser progressivement dans le drame. Le feu qui rougeoie l’horizon approche. Un sentiment d’angoisse saisit les habitants de la maison, à l’exception semble-t-il de Léon qui, enfermé dans son égotisme, semble insensible à tous les évènements qui l’entourent, sauf à Nadja, mais qu’il est maladroit !
Sur fond de catastrophe naturelle, qui devient aujourd’hui une donnée incontournable, Christian Petzold nous conte les affres de la création, les tourments de l’amour, de la jalousie, de la frustration, des désirs inassouvis, de l’amertume, dans un climat envoutant d’une grande séduction.