SELMA

Auteur : Ava DuVernay est une américaine de 42 ans, publicitaire de formation. En 2006 elle réalise un court métrage (Saturday Night Life). Deux ans plus tard elle produit et réalise un premier long métrage documentaire (This is life). En 2010 elle réalise son premier long métrage de fiction, I Will Follow. En 2012 elle obtient le prix du meilleur film à Sundance pour son film Middle of Nowhere. Puis elle s’essaye à la série en réalisant un épisode de Scandal et revient au cinéma avec Selma. Elle est une des rares réalisatrices noires américaines.

Résumé : Le film ne conte pas la vie de Martin Luther King. Il se focalise sur une période de trois mois. Après avoir obtenu le prix Nobel de la paix en octobre 1964 le leader noir se consacre, à partir de janvier 1965, à la lutte pour l’application effective de la loi sur le droit de vote des Noirs (pourtant obtenu en 1870). Il organise en mars trois longues marches non violentes de Selma à Montgomery, dont la première, sauvagement réprimée, est restée dans les mémoires comme le Bloody Sunday ; puis de Selma à la Maison blanche et qui aboutira au Voting Rights Act en août 1965.

Analyse : Ce film présente des ombres et des lumières, à l’instar du personnage principal.

Des lumières car il mérite une approbation sans réserve. On ne dira jamais assez combien le devoir de mémoire est une nécessité rendue plus indispensable encore dans les périodes difficiles que nous vivons. Nous ne rappellerons jamais assez, vis à vis de nos jeunes en particulier, la lutte de ceux qui se sont battus et souvent sont morts pour la dignité, l’honneur, le respect, la justice, la liberté et l’égalité des êtres humains. Nous ne montrerons jamais assez ces combats qui ont fait notre histoire surtout dans une actualité où ces valeurs que l’ont croyait établies sont plus menacées que jamais. Le président Obama, lors de la commémoration des cinquante ans de la marche de Selma au début du mois, a justement rappelé (qu’) « Il nous suffit d’ouvrir nos yeux, nos oreilles et nos cœurs pour savoir que l’ombre de l’histoire raciale de ce pays plane toujours sur nous ». Ce film est donc une belle leçon d’histoire dont les professeurs des écoles devront tirer le meilleur parti. D’autant qu’en évitant la caricature et le manichéisme Ava DuVernay nous montre que cette lutte est celle de tout « homme de bien » : ces marches ont rassemblé des personnes de toutes races et de toutes religions qui n’ont pas hésité à braver les interdits et à risquer leur vie auprès de ces noirs luttant pour que cesse leur humiliante ségrégation. La reconstitution historique est rigoureuse et juste même si le bras de fer entre le leader noir et le président Johnson est plus tendu que ce que les historiens nous relatent.
On saura grès également à la réalisatrice de ne pas nous avoir présenté un Martin Luther King lisse et intouchable. Il est tout simplement humain avec ses doutes, ses hésitations, ses erreurs, ses différents avec d’autres leaders, Malcolm X en particulier, ses soucis conjugaux. Le rôle de Martin Luther King est remarquablement porté par David Oyelowo qui a évité l’écueil d’en faire trop. Ce film est donc indispensable, nécessaire d’autant que, curieusement, c’est le premier biopic long métrage sur Martin Luther King.
Des ombres. La mise en scène extrêmement classique, sage et académique nous fait l’effet d’un travail bien appliqué d’une bonne étudiante en cinéma avec des connaissances mais sans grande imagination. L’ensemble reste une œuvre un peu plate qui manque singulièrement de souffle et dans laquelle l’émotion peine à percer à de trop rares moments. C’est dommage. On ne peut s’empêcher de penser au Lincoln de Spielberg et on se prend à regretter la patte d’un grand metteur en scène.

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