Cannes 10 juillet

Paul Verhoeven est un réalisateur néerlandais dont toute la filmographie est traversée par les thèmes du sexe, de la violence et de la religion. Il est l’auteur de nombreux films. Je ne citerai que Basic Instinct (1992, avec Sharon Stone) et Elle (2016) – avec Isabelle Huppert qui ont marqué la Croisette. Benedetta est une adaptation du livre Sœur Benedetta, entre sainte et lesbienne de Judith C.Brown, paru en 1989, lui-même inspiré de la vie de la religieuse italienne du XVIIe arrêtée pour homosexualité. Ce n’est pas un film facile, en tout cas à ne pas prendre au premier degré. On peut y voir une critique au vitriol de la religion, avec des membres qui ne sont pas dupes des « règles du jeu », donc de cette mascarade ; la croyance est un commerce, et plus encore un spectacle, où les nonnes sont des comédiennes. Sœur Benedetta est une illuminée, une imposteuse qui navigue entre délire et réalité. Le visage de Virginie Efira qui détient magistralement le rôle-titre change pratiquement à chaque scène, nonne possédée qui dit parler par la voix de Dieu et qui peut hurler comme le diable, lesbienne flamboyante et lascive, sainte en prière pleine de dévotion. C’est le récit d’un débordement mystique, sensuel, sexuel, délirant comme les aime le réalisateur. Il manie l’humour et le second degré car on rit à certains moments. Une mise en scène dérangeante tout comme le film qui peut déplaire. 

La Fracture de Catherine Corsini. Nommée aux César en 2019 pour Un amour impossible, elle s’attelle au mouvement des gilets jaunes qui a secoué la France en 2018-2019. Elle s’attarde sur le couple de Raf et Julie, au bord de la rupture, qui se retrouve dans un service d’urgence bondé le soir d’une manifestation à Paris. Le film se passe dans le huit clos de l’hôpital, avec l’afflux des blessés des manifestations qui font rage à l’extérieur et l’assaut des manifestants devant les grilles de l’hôpital. Dans un souci de n’oublier personne la réalisatrice aborde dans son film beaucoup de thèmes, la révolte des gilets jaunes, les violences policières, l’abandon de l’hôpital public et l’épuisement des soignants. Elle fait dialoguer des mondes très différents, Julie la bourgeoise bobo finit, comme c’était prévisible, par discuter avec un gilet jaune blessé, après s’être disputée avec lui. Des thèmes d’actualité certes mais amplement débattus. Le côté plaisant de son film est que la réalisatrice arrive avec un sujet pareil à introduire le drôle et le burlesque dont la charge incombe essentiellement à Valeria Bruni Tedeschi qui est irrésistible. 

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