FESTIVAL DE CANNES 20 MAI 2017

 

120 battements à la minute est le troisième long métrage d’un réalisateur français, Robin Campillo. Il se situe dans les années 90. L’action se passe dans le cadre de l’association ActUp au moment où celle-ci menait des actions violentes, particulièrement en faveur des séropositifs, contre l’indifférence scandaleuse des pouvoirs publics de l’époque, et également contre les laboratoires qui, par cupidité, ne donnaient pas suffisamment tôt le résultat de leur recherche pour de nouvelles thérapies. De ce point de vue c’est presque un documentaire car on assiste à leurs réunions, à leurs divergences, souvent exprimées avec violence et passion, à leur désespérance face à la mort qui les frappe inéluctablement. On les voit également s’aimer, se confier leur parcours, très souvent chaotique, dans une société qui n’était pas encore tout à fait prête à leur donner une place. Cette immersion dans ces groupes d’homosexuels, en majorité atteints du Sida, est sans aucune censure ni concession mais les scènes d’amour sont tournées dans des couleurs sombres qui jettent comme un voile de pudeur. Par ailleurs ce film est remarquablement interprété, en particulier par Nahuel Pérez Biscayart. On pourrait se poser la question de son intérêt, car les problèmes soulevés sont aujourd’hui assez largement dépassés. Mais ce film est important ; d’abord du point de vue de l’Histoire pour que ce passé de luttes et de souffrances ne tombe pas dans l’oubli. À cet égard c’est un film très pédagogique. Ensuite pour rappeler qu’il existe encore aujourd’hui des luttes de ce genre dans le monde, l’actualité récente nous le rappelle douloureusement. Un film qui mériterait une récompense.

Je voudrais quitter la compétition officielle pour vous parler d’un film de la sélection Un certain regard de la tunisienne Kaouther Ben Hania, La belle et la meute. C’est un très beau film, poignant et fort car il traite du viol, qu’on ne voit pas, d’une jeune fille par quatre policiers. La réalisatrice s’est inspirée d’un fait réel qui a eu lieu quand Ennahdha était au pouvoir. L’atmosphère pesante de cette nuit d’angoisse et de la société tunisienne à l’égard des femmes est particulièrement bien rendue. La jeune Myriam veut porter plainte pour obtenir la condamnation de ses bourreaux mais n’arrive pas à se faire entendre. Elle se heurte bien sûr aux tabous de la société, de la famille, de la religion. Elle est d’un courage exemplaire car malgré les pressions de la police, ses intimidations, ses violences et ses menaces, elle persiste dans sa volonté de dénoncer les infâmes, aidée en cela par un vieux policier de la vieille école. Avec une grande sensibilité la cinéaste montre surtout la torture morale de cette jeune femme remarquablement interprétée par Mariam Al Ferjani.

Et rendez-vous, comme chaque jour, en direct de Cannes pour Fréquence protestante, à midi.

 

 

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