Le char et l’olivier, Une autre histoire de la Palestine

Auteur : Roland Nurier est un scénariste et réalisateur français.

Résumé : Ce documentaire nous conte l’histoire de la Palestine, de son origine à aujourd’hui. Le but du cinéaste n’est pas de polémiquer et d’alimenter la querelle, mais, à partir d’éléments historiques indiscutables, de retracer comment et sur quelles bases, depuis la fin du 19ème siècle, s’est créé ce qui est aujourd’hui « l’État » d’Israël. Un éclairage qui permet de se débarrasser des clichés et des idées reçues.

Analyse : Il fallait un sérieux courage pour s’atteler à un sujet aussi sensible et clivant que l’origine du conflit israélo-palestinien. Au 19ème siècle, la Palestine était une terre de cohabitation où vivaient, à côté des arabes musulmans, des minorités juives et catholiques. Un journaliste austro-hongrois à Paris, Theodor Herzl dans un ouvrage L’État des juifs (1896) jette les bases d’un sionisme politique en défendant le projet d’un État pour les juifs en Palestine. Son projet n’est pas pour déplaire aux grandes puissances qui, dans un cynisme absolu, soutiennent cette idée, en particulier la France et la Grande Bretagne, voyant là l’opportunité de se débarrasser des juifs d’Europe. N’oublions pas que le contexte en France était celui de l’affaire Dreyfus, et en Russie des pogroms. Par la déclaration de Balfour en 1917, la Grande Bretagne apporte son soutien à la création d’un « foyer national juif » qui ne porterait pas atteinte « aux droits civiques et religieux des collectivités non juives existant en Palestine. » Ce texte marque l’une des premières étapes dans la création de l’État d’Israël. Certes après la Shoah, par culpabilité sans doute, par compassion peut-être, le processus s’accélère puisque le 29 novembre 1947, l’ONU, sous l’impulsion de la France et de l’Angleterre, élabore un plan de partage de la Palestine historique où l’étendue des territoires attribués aux juifs, pourtant minoritaires, est nettement plus importante que celle laissée aux arabes. Après la guerre des six jours les territoires s’étendent de façon spectaculaire, ne laissant aux arabes que la Cisjordanie, un territoire au Nord et la bande de Gaza. Aujourd’hui, après la politique de création des colonies juives en Cisjordanie, les arabes n’ont plus que des bribes de territoires, et la fameuse bande de Gaza. La démarche du réalisateur est très documentée. Il s’appuie sur de nombreuses incrustations d’images et de cartes géopolitiques, sur une série d’interviews d’historiens, de journalistes, de membres de l’ONU, de militants juifs (du mouvement l’Union des juifs français pour la paix UJFP) et palestiniens, d’universitaires français, américains, de politiques élus, comme la maire de Bethléem, de simples citoyens. Il cite les mots de David Ben Gourion (premier ministre entre 1948 et 1963), qui a beaucoup œuvré pour la création de l’État d’Israël, « Si j’étais un leader Arabe, je ne signerais jamais un accord avec Israël. C’est normal, nous avons pris leur pays … Pourquoi devraient-ils accepter cela ? ». Ce faisant le réalisateur donne au spectateur des éléments de compréhension et d’information afin que chacun réfléchisse et se fasse son opinion.

L’intérêt du film est également de montrer que ce conflit n’est pas fondé sur une question religieuse. Mais tout banalement sur une attitude d’un peuple colonisateur à l‘égard d’un autre. Ce qui a le mérite de rejeter une idée trop répandue et qu’Israël entretient volontiers ; non, critiquer la politique de l’État d’Israël n’est pas un acte d’antisémitisme. C’est défendre le droit d’un peuple à vivre en liberté et en paix sur sa terre. Beaucoup d’interviewés défendent l’idée de la légitimité de la révolte et de la lutte des palestiniens. Le film nous montre également le sort désastreux des habitants de Gaza, prisonniers sur leur terre, soumis à un embargo qui entraine une paupérisation dramatique de la population qui ne peut plus vivre que de l’aide internationale, subissant une véritable politique d’apartheid, mot que beaucoup prononcent. L’actualité éclaire dramatiquement cette situation.

Ce documentaire fait donc fi du discours ambiant en ne renvoyant pas les deux parties dos à dos. Il donne un éclairage sur cette situation inextricable sans avoir l’ambition d’apporter une pierre à l’édifice de la paix. Il veut simplement nous donner à réfléchir. Vient alors à l’esprit cette question : comment pourrait-on réussir à instaurer un dialogue entre les deux protagonistes du conflit ? 


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