Rocks

Autrice : Sarah Gavron est une réalisatrice britannique, née en 1970. Pendant ses études à la National Film and Television School (NFTS) en Angleterre et après l’obtention de son diplôme, la cinéaste a réalisé de nombreux courts métrages présentés à l’international et lauréats de multiples prix. Elle a été sacrée Meilleure jeune réalisatrice aux TV BAFTA Awards et Révélation de l’année aux Royal Television Society Awards et aux Women in Film and TV Awards pour This Little Life, le téléfilm de BBC TV lauréat du Dennis Potter Award (2003). Elle a entamé sa carrière au cinéma avec Rendez-vous à Brick Lane (2008), film qui lui a valu une nomination aux BAFTA Awards et aux BIFA Awards.  Son long métrage documentaire intitulé The Village at the End of the World a remporté le prestigieux Margaret Mead Award. Elle a réalisé en 2015 Les Suffragettes qui retrace la lutte, à Londres en 1912, de femmes pour obtenir le droit de vote (voir ma fiche du 7 décembre 2015). Après une série télévisée, Transparent (2017), elle réalise Rocks (2019).

Interprètes : Bukky Bakray (Shola « Rocks”) ; Kosar Ali (Sumaya) ; Shaneigha-Monik Greysson (Roshé) ; Ruby Stokes (Agnes).

Résumé : Rocks, 15 ans, vit à Londres avec sa mère et son petit frère. Quand du jour au lendemain leur mère disparait, une nouvelle vie s’organise avec l’aide de ses meilleures amies. Rocks va devoir se battre pour échapper aux services sociaux.

Analyse : Pour ce dernier film Sarah Gavron a choisi des élèves de 3e et 4e d’un lycée londonien. Ce sont donc des actrices non professionnelles qu’elle a associées à l’écriture du film et qui lui ont donné leur libre interprétation, leur spontanéité, leur vivacité et leur langage. Autour de l’héroïne, Rocks, ainsi baptisée par ses camarades pour son caractère de fer, son courage et sa détermination, véritable force de la nature, gravite une série d’adolescentes d’origines très diverses du quartier d’Hackney. Une bande dynamique, joyeuse, mais surtout d’une grande solidarité. Dans ces adolescentes, il y a celles qui vivent au sein d’une famille aimante, et celles qui sont dans une situation bien plus compliquée sur le plan social. C’est le cas de Shola (Rocks) qui abandonnée par sa mère se retrouve à 15 ans avec des responsabilités d’adulte, la charge de son petit frère de 7ans, alors que l’argent épuisé, l’électricité est coupée et les services sociaux alertés. Dans son errance pour éviter d’être séparée de son frère, Shola, pudique au début avec ses amies, finit par leur demander aide et y trouve une merveilleuse solidarité. Tableau d’une Angleterre où la diversité ethnique et religieuse ne pose aucun problème dans ce milieu des oubliés de la société. Cette bande de six jeunes filles est l’image d’une génération qui utilise le téléphone portable, dont les images filmées sont parfois projetées à l’écran, qui écoutent de la musique pop, reggae ou hip hop. Elles sont inépuisables, libres, joyeuses, dynamiques, transgressives, provoquent leurs professeurs et donnent au film une énergie communicative accentuée par une caméra très mobile, une mise en scène et un montage alertes. Certes le film comporte des moments tristes et émouvants, mais il reste plein d’une vitalité et d’une sororité lumineuse.

Un film qui, dans la tendance actuelle de montrer des « héroïnes » (voir Bande de filles de Céline Sciamma, Divines de Houda Benyamina, Mignonnes de Maïmouna Doucouré, ou Adolescentes de Sébastien Lifshitz), est totalement féminin, jusques et y compris l’équipe technique. Avec sobriété et curiosité Sarah Gavron s’est placée à côté de ses comédiennes leur laissant une bonne partie du temps être ce qu’elles sont, c’est-à-dire des jeunes filles gaies, rieuses, chahuteuses, pleines de vie au-delà des misères de leur existence. En cela le film est très différent des films de Ken Loach auquel on l’a trop souvent comparé. Il n’y a pas chez Sarah Gavron cette désespérance qui interdit tout espoir. Certes ce film est dans la tradition du réalisme social britannique mais il y a une lumière, une entraide, un espoir qui interdit de désespérer. Le film se termine sur des images lumineuses. 

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