Festival de Cannes 20 mai 2023

Jeune cinéaste franco-sénégalaise de 36 ans, récemment sortie de la FEMIS (2015) Ramata-Toulaye SY présente en compétition officielle son premier long métrage. Son premier court métrage, Astel (2022) a remporté le Prix spécial du jury au Festival de Clermont-Ferrand. Elle est en compétition pour Banel et Adama. Ce film, éligible également à la Caméra d’or, relate sous la forme d’un conte une histoire d’un amour qui étouffesous le poids des traditions, des injonctions familiales et de la répartition genrée des rôles, dans un petit village du nord du Sénégal. Banel est une fille un peu particulière. Elle ne porte pas l’habit traditionnel, cheveux courts et tee-shirt elle est amoureuse d’Adama et réciproquement. Ils se marient et rêvent d’avoir leur maison à eux, ce qui déjà bouscule les traditions. Ils désensablent une ancienne maison pour y faire leur nid d’amour. Mais plus spéciale encore dans ce pays où se marier et avoir des enfants est le passage obligé pour les femmes, elle ne veut pas avoir d‘enfant. Adama me suffit dit-elle. Quant à Adama, fils de chef il ne veut pas devenir chef, ce qui là encore est peu ordinaire. Mais le poids des traditions va faire céder Adama et balayer ce bel amour qui se voulait libre. Banel se transforme en créature étrange tuant à la fronde tout oiseau ou margouillat qui passe à sa portée, symbole de sa propre fronde. Le deuil de son amour impossible se manifeste par des couleurs qui palissent et le chant des oiseaux qui disparait. La réalisatrice met également l’accent sur les malheurs de l’Afrique. Les troupeaux de vache meurent de la sécheresse. Les récoltes ne poussent pas faute de pluie. Le village songe à partir, mais où ? Un film où les traditions mais surtout les croyances sont présentes, mas qui manque peut-être de force vu le sujet.

Todd Haynes, cinéaste américain n’est pas un inconnu à Cannes. Il avait obtenu en 2015 un prix d’interprétation pour Rooney Mara dans son si beau film Carol. Il présente cette année May December. Le propos est relativement simple : pour préparer son nouveau rôle, une actrice célèbre vient rencontrer celle qu’elle va incarner à l’écran, dont la vie sentimentale a enflammé la presse à scandale et passionné le pays 20 ans plus tôt. Il s’est inspiré de l’affaire Mary Kay Letourneau, professeure dont l’histoire d’amour avec un ado de 12 ans, qui est ensuite devenu son mari, a défrayé la chronique aux États-Unis. Scandale, mésalliance, différence de classe sont au programme. Gracie (Julianne Moore) est mariée à celui qui fut le camarade d’école de son fils (Joe), dont elle est tombée follement amoureuse alors qu’il n’avait que 13 ans. On comprend qu’elle a fait de la prison pour cela. Le couple qui a eu deux enfants et vit ensemble depuis 24 ans, semble heureux même si elle a tendance à le traiter comme un domestique. Toutefois l’arrivée de l‘actrice Elizabeth Berry (Natalie Portman) ambigüe et perverse, va troubler cette harmonie apparente. Elle arrive à un moment difficile pour un couple : les deux enfants vont quitter la maison familiale. Elle pousse Joe à s’interroger sur son couple et à faire le bilan. Le film s’ouvre sur les notes rythmées de Michel Legrand composées pour Le Messager de Joseph Losey, qui créent une ambiance inquiétante. Il évoque le film de Joseph L. Mankiewicz, Ève, mais sans la force de ce dernier. Un petit Todd Haynes loin du flamboyant Carol.

Laisser un commentaire