La syndicaliste

Auteur : Jean-Paul Salomé, né en 1960 est un réalisateur, scénariste, acteur français. Il fait des études de cinéma à l’Université de la Sorbonne Nouvelle, avant de réaliser deux courts métrages : L’Heure d’aimer et La Petite commission. Après une première expérience de fiction pour la télévision (Crimes et jardins en 1991), il réalise Les Braqueuses (1994) puis signe, quatre ans plus tard Restons groupés. A partir de 2001 il se consacre à la réalisation de films ambitieux, à gros budget, dont le premier Belphégor, le fantôme du Louvre. Suivent une version modernisée du gentleman cambrioleur Arsène Lupin  (2004) et Les Femmes de l’ombre (2008). En 2010 il réalise son premier film en langue anglaise, Le Caméléon, sur l’histoire vraie d’un imposteur. Après Je fais le mort (2013), il réalise deux films avec Isabelle Huppert, La Daronne (2019), Prix Jacques Deray de l’Institut Lumière de Lyon, et La syndicaliste (2023).

Interprètes : Isabelle Huppert (Maureen Kearney) ; Gregory Gadebois (son mari) ; Marina Foïs (Anne Lauvergeon) ; Pierre Deladonchamps (Adjudant-Chef enquêteur).

Résumé : Un matin, Maureen Kearney est violemment agressée chez elle. Elle travaillait sur un dossier sensible dans le secteur nucléaire français et subissait de violentes pressions politiques. Les enquêteurs ne retrouvent aucune trace des agresseurs… Est-elle victime ou coupable de dénonciation mensongère ? 

Analyse : Ce film est inspiré d’une histoire vraie, celle de Maureen Kearney, une ex-syndicaliste CFDT, lanceuse d’alerte qui a tenté de défendre des milliers d’employés d’Areva. Grâce à des documents confidentiels qui lui ont été transmis anonymement, elle apprend qu’un accord est en train d’être signé entre le fleuron du nucléaire français EDF et la Chine. Cet accord risquerait de mettre près de 50 000 salariés au chômage (accord qui s’est quand même concrétisé avec transfert de technologie qui permet à la Chine de vendre des centrales nucléaires dans le monde, y compris en France !). Lorsqu’elle le dénonce, elle est agressée chez elle, bâillonnée, violée, avec un A gravé au couteau sur son ventre. Après une enquête bâclée aux graves insuffisances, elle est accusée et condamnée en première instance pour avoir menti et simulé son agression. La Cour d’appel la réhabilitera en 2018, mais ses agresseurs, au mode opératoire déjà connu, ne sont toujours pas retrouvés à ce jour. Ce film coup de poing mérite d’être vu pour plusieurs raisons. D’abord parce qu’il est toujours utile de dénoncer des scandales quand ils impliquent l’État au travers de ses entreprises stratégiques. On a trop peu parlé dans la presse de Maureen Kearney. Ce film bienvenu dénonce enfin son martyr et son histoire exemplaire. Ensuite pour le message féministe qu’il contient. Anne Lauvergeon, mise en scène également dans ce film, a subi les conséquences, tout comme Maureen Kearney, des discriminations sexistes faites aux femmes surtout lorsqu’elles sont puissantes et femmes de pouvoir. L’agression dont a été victime Kearney est à cet égard typique, avec le viol comme arme dégradante. Un homme n’aurait sans doute même pas fait l’objet d’une agression. Ce fût d’ailleurs le cas dans un précédent qui a aidé Maureen Kearney à être innocentée. Il s’agissait alors d’un employé qui avait alerté sur certains problèmes. Lui n’a subit aucune violence mais sa femme a été ballonnée et violée, tout comme la syndicaliste ! Le caractère bien trempé de Kearney et sa résistance inébranlable reste une leçon. Il est important de rappeler que, malgré tout, certaines femmes ne se laissent pas intimider et continuent le combat.

Je mettrai toutefois deux bémols à ce film :

Dans son souci didactique de n’oublier aucun détail, Jean-Paul Salomé réalise un film un peu long qui aurait mérité un montage plus nerveux.

La critique a encensé Isabelle Huppert pour sa « performance ». J’ai trouvé que le côté papier glacé de l’actrice peine à laisser percer le feu d’une militante syndicaliste.

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