Je verrai toujours vos visages

Autrice : née en 1978 Jeanne Herry est une scénariste, réalisatrice, actrice française. Fille de Miou-Miou et de Julien Clerc elle se forme à l’École Internationale du Théâtre et intègre le Conservatoire national supérieur d’art dramatique à Paris. Elle joue dans plusieurs pièces et trouve des petits rôles au cinéma. Elle réalise en 2009 son premier court métrage et en 2014 son premier long, Elle l’adore. Suit Pupille (2018) un drame émouvant sur le parcours de l’adoption qui connait un beau succès. Après avoir réalisé six épisodes de la série Mouche, elle met en scène son troisième long métrage, Je verrai toujours vos visages.

Interprètes : Adèle Exarchopoulos (Chloé) ; Leila Bakti (Nawelle) ; Élodie Bouchez (Judith) ; Gilles Lellouche (Grégoire) ; Jean-Pierre Daroussin (Michel) ; Dali Benssalah (Nassim) ; Miou-Miou (Sabine) ; Suliane Brahim (Fanny) ; Birane Ba (Issa).

Résumé : Plusieurs personnes font l’expérience de la justice restaurative qui propose à des victimes et auteurs d’infractions de dialoguer au sein de dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles. 

Analyse : La justice dite « restaurative », bien que datant d’une loi de 2014, est un mécanisme assez peu connu du grand public. Il consiste soit à la médiation, qui permet à des victimes de rencontrer et parler avec leurs agresseurs, soit à mettre en présence des victimes avec des délinquants qui ont commis le même type de violences que celles qu’elles ont subies. C’est de part et d’autre un acte volontaire, sans contrepartie, encadré par des animateurs formés pour ce type de rencontre. Le premier mérite de ce film, et ce n’est pas le seul, est de nous montrer ces deux types d’exercice. Sous une forme parfois de documentaire ou de reportage, et c’est très bien venu, la réalisatrice nous offre un film puissant, très juste de ton, qui nous entraine avec intelligence, pudeur et talent, au cœur de ce processus. Chloé veut rencontrer son frère qui a abusé d’elle pendant son enfance et qui revient s’installer dans la même ville. Trois victimes de vol à l’arraché, de home-jacking ou de holdup, vont rencontrer trois délinquants auteurs de ce type de délits. En quinze heures de face à face sur cinq semaines, ils échangent et s’écoutent. Une justice basée sur la parole exprimée et partagée. Des moments durs de colère non retenue qui aident les délinquants à réaliser les conséquences de leurs actes auxquelles ils n’ont pas réfléchi, et d’éviter la récidive. Aucun angélisme mais des dialogues très émouvants de part et d’autre qui permettent une meilleure compréhension réciproque. Ce n’est pas le pardon qui est recherché, mais la réparation des victimes et le réveil chez les délinquants de leur part d’humanité pour les aider à se réparer. Personnellement plutôt que « restaurative » j’aurai préféré qualifier cette justice de « réparatrice » car c’est bien le but recherché. Dans une mise en scène rigoureuse, brillante, fluide, sans digressions inutiles, Jeanne Herry filme en gros plan les échanges, ce qui les rend particulièrement émouvants. Parfaitement documentée sur cette procédure, elle n’émet aucun jugement, imaginant dans une écriture intelligente et sensible des dialogues d’une grande justesse, portés par de remarquables acteurs et actrices tous et toutes très habité.e.s par leur rôle. Dans ce merveilleux film, bouleversant d’humanisme et de sensibilité, on tend, par-delà le bien et le mal, à atteindre une solidarité d’espèce, faite de respect et d’amour.

1 Comments

  1. Un merveilleux moment de cinema. Tout est reussi, le theme abordé, les acteurs extraordinairement filmés.A l unanimite des spectateurs que jai pu rencontrer, ce film reste marquant
    Marie christine

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